Genre : Documentaire, judiciaire, policier
Durée : 52 min
Année : 2009
Résumé
« Entre 1983 et 1996, dix enfants ont disparu dans la région de Grenoble. Ils étaient âgés de 5 à 15 ans et ont été enlevés en plein jour alors qu’ils jouaient au pied de leurs immeubles. Ces crimes sont-ils liés ? Pourquoi aucun suspect n’a-t-il pu être arrêté ?
En mars 1983, Ludovic, 6 ans, accompagne ses frères, dont le plus grand a 8 ans, pour faire une course à 200 mètres du domicile familial. Ils sont abordés par un inconnu en Mobylette qui prétend chercher son chien. Le petit garçon reste avec lui tandis que les deux autres enfants font le tour du quartier pour retrouver l’animal. Lorsqu’ils reviennent, Ludovic n’est plus là. Il ne sera jamais retrouvé. En juillet 1983, à quelques kilomètres de là, Grégory, 8 ans, va jouer au pied de son immeuble après dîner. Lorsque son demi-frère descend à son tour, Grégory a disparu. Il est retrouvé le lendemain par un promeneur, dans une forêt à vingt kilomètres de chez lui. Enlevé, frappé, laissé pour mort et jeté dans une décharge sauvage, il a trouvé la force de se traîner jusqu’à un chemin.
Des petits disparus de l’Isère, il est le seul à s’en être sorti. Malgré son jeune âge et l’état de choc dans lequel il se trouve, il est capable de donner de nombreux détails aux enquêteurs concernant son agresseur et la voiture dans laquelle il a été enlevé. Pourtant, malgré son témoignage précis et de gros moyens mis en œuvre, les policiers n’arrêteront personne. Huit nouvelles disparitions ont lieu entre juin 1985 et novembre 1996. Certains corps ont été mutilés, portant parfois des traces d’agressions sexuelles. La petite Charazed, en revanche, n’a jamais été retrouvée. La fillette de 10 ans s’est volatilisée en juillet 1987, alors qu’elle descendait les poubelles après déjeuner. Sans le moindre indice ou témoignage, les policiers se sont une nouvelle fois retrouvés démunis.
Si les enquêteurs écartent à l’époque la piste d’un coupable unique, le profil des victimes est troublant : des enfants issus de milieux modestes, d’origine maghrébine, vivant dans des cités et enlevés en plein jour. Faut-il y voir la signature d’un tueur en série ? Pouvait-il s’agir de plusieurs criminels agissant ensemble ? De cas sans rapport les uns avec les autres ? Autre élément de réflexion, les crimes ont eu lieu près de grands axes routiers : et si le ou les tueurs venaient d’une autre région ?
Une cellule d’enquête inédite
Une chose est sûre pour les familles des victimes : les services de la région ont manqué de coordination et les dossiers auraient dû systématiquement être comparés. Or, la dispersion des affaires entre plusieurs juges d’instruction et services d’enquête n’a pas permis de faire des recoupements. Bien au contraire, à force d’acharnement, Ferouz, la sœur de la petite Charazed, enlevée en 1987, apprend en 2005 que le dossier a été refermé en 1988, un an à peine après le drame. Les parents n’en ont même pas été tenus informés. Les éléments de l’enquête n’ont donc jamais été pris en compte lors des disparitions qui ont suivi.
Ferouz et d’autres familles se regroupent et font pression sur la justice pour obtenir la réouverture des dossiers. En 2008, la procureure de Grenoble décide la création d’une cellule spéciale, baptisée « mineurs 38 » : douze gendarmes vont tenter de recouper toutes les informations dont ils disposent et les mettre en perspective. Malheureusement, une partie des scellés ont été perdus ou détruits, ce qui complique encore un peu plus leur travail. Malgré tout, les familles des victimes veulent y croire et espèrent qu’après vingt ans de tourment elles obtiendront au moins quelques bribes de réponses. Les progrès de la science, et notamment les analyses ADN, permettront-ils enfin de lever une partie du mystère qui entoure les enfants de l’Isère ? »
Stéphanne Coignard
Mon avis
Ce soir, j’ai voulu vous proposer une chronique et un avis un peu particulier sur un documentaire relatant une affaire qui a probablement influencé mes parents et, par extension, mon enfance et mon adolescence. Ce ne sera pas un avis sur la qualité ou non du documentaire mais plutôt une chronique pleine d’interrogations et de souvenirs.
Pourquoi cette affaire en particulier? Première raison, j’ai grandi (et habite encore) l’Isère, dans un petit village qui borde l’autoroute A48 (Lyon-Grenoble), le long de cette autoroute où plusieurs enfants (quand on relie les affaires entre elles) ont disparu. J’avais plus ou moins l’âge des petits disparus. L’affaire a, bien évidemment, angoissé les parents. J’ai donc grandi avec l’avertissement : « ne parle jamais à un étranger, même s’il te propose des bonbons ». Bien que mes souvenirs soient confus, je peux affirmer que la peur était palpable, il était hors de question, à la fin de l’école, par exemple, quelqu’un d’autre que les parents, éventuellement les grands-parents ou la nounou, vienne récupérer les enfants.
Mais l’autre raison, évidemment, c’est l’énorme fiasco judiciaire autours de ses disparitions et de l’agression de Gregory. Comment peut-on refermer un dossier sans en informer la famille? La police scientifique et les méthodes modernes d’investigation étaient certes balbutiantes, voire inexistante mais comment est-ce possible que les rares indices aient été perdus? Et combien d’enfants ou de personnes ont disparu, victimes d’un tueur, dont les affaires pourraient trouver des éléments de réponses grâce à des techniques modernes mais dont les indices ont été détruits? Le documentaire fait se poser ses questions. Le manque de dialogue, d’échange entre les services ou les départements est aussi un point soulevé par cette affaire.
L’un des enlèvements, celui de la petite Charazed a eu lieu à Bourgoin-Jallieu. Bourgoin-Jallieu où j’ai fait mes années lycée, Bourgoin-Jallieu où je vais faire mes courses, au cinéma ou boire un verre avec mes amis. Et que j’ai croisé peut être la soeur ou les parents de Charazed et que j’éprouve une sorte de douleur pour cette famille qui ne saura probablement pas ce qui est arrivée à cette petite fille. Et de ne pas pouvoir les aider. Je ne veux pas faire dans le pathos ou le larmoyant mais on ne peut que se mettre à la place de ses familles qui ne sauront jamais ce qui est arrivé à leur enfant.
Enfin ce documentaire nous rappelle aussi que derrière ce ou ces tueurs qui fascinent les foules, il y a d’abord et avant tout des victimes, des familles détruites qui sont souvent abandonnées par l’état, la justice et le système dans son ensemble.